"Si vous décrochez, vous êtes fini", dit Mikael Silvestre. "Vous ne pouvez pas vous reposer comme le font les attaquants ou les milieux de terrain".

Silvestre témoigne de ce qu'il faut pour être défenseur à haut niveau et il sait de quoi il parle puisqu'il a remporté quatre fois la Premier League avec Manchester United entre 2000 et 2007. On attend désormais des défenseurs qu'ils construisent des attaques et maintiennent une ligne haute afin d'aider leur équipe à pousser et les composantes traditionnelles de la défenses comme aller mettre la tête là où ça fait mal et engager son corps dans le jeu se sont donc perdues en cours de route

"Quand je jouais, il fallait être un défenseur exceptionnel, sinon on ne pouvait pas intégrer l'une des quatre meilleures équipes", explique l'ancien arrière gauche d'Arsenal Nigel Winterburn, qui a remporté trois titres de champion au club entre 1987 et 2000. "Aujourd'hui, vous n'avez pas besoin d'être aussi bon défensivement, mais si vous n'avez pas cette qualité technique sur le ballon, il y a peu de chances pour que vous intégriez une équipe de haut niveau."

Ce changement, qui exige que les défenseurs aient plus de capacités techniques, se reflète dans les récentes statistiques de la Premier League sur la réalisation des passes. Au cours des cinq dernières saisons, au moins un défenseur s'est classé parmi les trois meilleurs joueurs pour le taux de réussite des passes. En 2020/21, John Stones, Ruben Dias et Thiago Silva faisaient partie du trio de tête.

Sans surprise, étant donné leur style de jeu, Manchester City - qui est à pour conserver le titre de Premier League dans les derniers marchés de paris foot de Betway - a un défenseur présent dans tous les cinq précédents, sauf un.

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À l'époque de Winterburn, cependant, il y avait trop de risques pour faire cela en jouant à l’arrière. L'homme de 57 ans a passé huit ans sous les ordres de George Graham, un manager réputé pour son exigeante discipline défensive.

“ Aujourd’hui, les défenseurs et les arrières modernes doivent être très à l’aise avec le ballon car ils sont souvent dans des zones avancées à cause de la manière dont les équipes jouent depuis l’arrière” ajoute-t-il. "Mais avec Georges, nous étions toujours évalués sur ce que nous faisions en défense. En bas de mon côté, je pouvais aller jouer, mais on savait que Lee [Dixon] devait se ranger aux côtés des deux autres centraux et vice versa si Lee partait.”

"Oui, nous avons parfois joué depuis l'arrière quand Arsène Wenger a pris les rênes, mais dès que le gardien recevait le ballon, il allait jusqu'à la ligne médiane et vous jouiez à partir des coups.”

"Je pense que toute l’essence du jeu, en particulier sa rapidité, a changé. Quand j'ai commencé, le jeu était beaucoup plus lent. Si l’on pense aux conditions de jeu, il était très rare que vous ayez un terrain vert après Noël."

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La qualité des terrains a certainement fait une énorme différence dans la capacité des défenseurs à jouer en dehors de la défense.

Gary Pallister, un autre quadruple vainqueur du titre à United - entre les années 1992 et 1997 - était à l'aise en possession du ballon, mais estimait être gêné par les mauvaises conditions de jeu.

"Beaucoup de difficultés étaient dues aux terrains", confirme Pallister. Si on regarde les terrains sur lesquels j'ai joué au début de ma carrière, ils ressemblaient à des terrains de rugby. Aujourd'hui, on dirait des greens et vous pouvez prendre plus de risques car vous faites confiance au terrain."

La qualité des terrains n'ayant jamais été aussi bonne, il est logique qu’à l'entraînement on veuille que le ballon soit plus souvent au sol. Mais il n'en a pas toujours été ainsi, avant le travail en dehors du ballon était prioritaire à l'entraînement.

"Je pense que si nous devions revoir certaines des séances d'entraînement organisées par George pour nos quatre arrières avec un joueur moderne, il regarderait ça complètement incrédule", déclare Winterburn. "Nous avions l'habitude de sortir plusieurs fois par semaine et il n'y avait que les quatre défenseurs et l'entraîneur sur le terrain d'entraînement. Il n'y avait même pas de gardien et nous n'avions pas forcément de ballon sur le terrain. Selon comment il voulait que nous réagissons, il trottinait de position en position, en nous disant d’imaginer qu'il y avait un morceau de corde entre chaque joueur pour que les lignes restent toujours les mêmes et que nous nous déplacions de manière synchrone. La discipline était un élément plus important comparé à aujourd’hui”

La nature des défis auxquels les défenseurs sont confrontés a également changé.

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Le "false nine" n'existait pas dans les années 90, mais il n’était pas rare pour les équipes de s'aligner avec deux attaquants plutôt qu'un. En fin de compte, cela signifiait que les défenseurs étaient soumis à une épreuve physique exigeante chaque fois qu'ils entraient sur le terrain. "Au début de ma carrière, il y avait beaucoup d'avant-centres qui étaient assez robustes", dit Pallister."Pensez à certains d'entre eux comme Mick Harford et John Fashanu, par exemple. C'était le travail de ces gars-là d'embêter le demi-centre et de l'intimider. Physiquement, il fallait être prêt à relever ce genre de défi, et c'est quelque chose que j'ai trouvé difficile lorsque j'ai commencé à jouer au football, car j'étais très mince. Je me suis fait bousculer par des gars plus grands que moi et j'ai dû apprendre à faire avec. J’ai essayé de prendre de la masse en m’entrainant avec des poids et en buvant quelques verres de Guinness."

Les footballeurs d'aujourd'hui ne pourraient pas s'en tirer comme ça. Le jeu a changé et, avec lui, la défense. Cependant ce changement ne s’est pas fait immédiatement. L'ancien arrière droit d'Arsenal, Lauren, qui a été recruté comme milieu de terrain en 2000, en est bien conscient : "J'ai dû changer de position et j'ai eu quelques problèmes pour défendre au début, surtout lorsque le ballon était de l'autre côté, je me surprenais souvent à regarder le ballon", explique-t-il. "Maintenant, on demande plus de choses aux défenseurs. Nous devons nous réadapter à cette nouvelle ère."

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Silvestre, un joueur doté d'une grande vitesse de récupération qui conviendrait à une équipe souhaitant défendre sur la ligne médiane, estime que ce ne serait pas un problème pour lui de jouer maintenant mais précise aussi qu'il est plus difficile pour les défenseurs de s'épanouir aujourd'hui. "La manière de jouer n'est pas en leur faveur", dit-il. "Certaines personnes iraient jusqu'à dire que l'art de la défense a disparu".

Pour Lauren, cependant, ce n'est pas le cas : "Tout n'est pas fantastique dans le jeu d'aujourd'hui", dit-il. "Néanmoins pour être au top maintenant, vous devez combiner le meilleur des compétences les plus traditionnelles et le meilleur des compétences modernes. L'évolution a du bon."